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05 octobre 2020

La jeune fille aux sandales de sable

En vain la mer fait le voyage

Du fond de l'horizon pour baiser tes pieds sages.

Tu les retires

Toujours à temps.

 

- Léon-Paul Fargue -

 

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La jeune fille pose le pied sur le quai désert. Elle est chaussée de tennis à la toile défraîchie par le voyage.

 

Dans un nuage des montagnes, l'autorail s'est enveloppé d'une pellicule de gouttelettes.

 

Maintenant qu'il ronronne à l'arrêt sous le soleil de la plaine, quelques irisations perlent encore à la surface de ses tôles et de ses vitres grasses.

 

Unique passagère à descendre dans cette gare, la jeune fille tire sa valise souple à roulettes à l'ombre d'un cèdre où elle a repéré un banc en ciment ébréché.

 

Elle repense aux jardins piquetés de Perce-neige qu'elle a quittés pour ce pays où mûrissent des citrons.

Cette pensée lui vient à la vue d'un lampadaire encore inexplicablement allumé dont le verre a la forme d'un citron mais dont la lumière inutile évoque la blancheur scarieuse des globes de Perce-neige.

 

Les dernières brumes du petit matin s'effilochent dans la chaleur.

 

La jeune fille jette un rapide regard autour d'elle, délace ses tennis et étend ses pieds moites dans un rayon de soleil. Lorsqu'ils sont secs et lisses, elle se rechausse à regret, se lève et tire sa valise à roulettes.

 

Elle traverse les voies puis marche un moment dans des rues encore vides.

 

Du haut d'un mur délabré, un chat la regarde passer en clignant des yeux.

 

D'un pas régulier, elle effleure la poussière sans prêter attention à son ombre le long des dignes façades rayées de persiennes. Parfois, les roulettes de la valise se bloquent en crissant sur du sable.

 

Bientôt, les murs des maisons perdent de leur superbe et l'ombre de la jeune fille s'étire contre une haute palissade de bois clair.

 

Apparaît une porte de bois lessivée par les intempéries et ornée d'un heurtoir en forme d'hippocampe.

 

La jeune fille frappe, ouvre la porte et cela provoque un courant d'air tiède qui dépose une fleur de sel sur ses lèvres.

 

Dès que la porte est refermée, une brise à peine plus fraîche l'enveloppe doucement.

 

Immobile, elle frissonne devant l'océan qui respire comme un gros chat endormi puis tire de nouveau sa valise sur un chemin de caillebotis.

 

Elle s'arrête pour enlever ses tennis dont elle lie les lacets pour les suspendre autour de son cou.

 

La brise marine vient apaiser ses pieds nus sur les lamelles de bois.

 

Un vendeur d'étoffes et de bimbeloterie s'écarte devant elle et lui conseille de prendre garde aux clous qui peuvent dépasser car, insiste-t-il, il n'est pas question de blesser et d'abîmer des pieds aussi fins et délicats qui ne sauraient se contenter de sandales de sable alors que de belles espadrilles jaunes, violettes, bleues ou rouges vraiment pas chères les protégeraient en beauté.

 

Heures, minutes, et secondes se dissolvent dans le temps spécifique des dunes.

 

Le vendeur, le chat qui cligne des yeux, l'autorail irisé, le voyage, tout est reparti au large.

 

Quant à la jeune fille, elle marche dans l'écume et éprouve une joie tranquille.

 

Elle ne s'étonne en rien de sa propre splendeur ni de celle du paysage maritime.

 

Elle pense juste, en regardant ses pieds, qu'à chaque flux et reflux, l'océan s'amuse à lui retirer ses sandales de sable.

 

aux grands jours,club,christian cottet-emard,la jeune fille aux sandales de sable,recueil,récit onirique,blog littéraire de christian cottet-emard,club littéraire des amateurs de cigares,édition,autorail,océan,voyageExtrait de mon recueil récemment paru Aux grands jours.

Tableau : Seul à la plage - Hughie-Lee Smith, 1957.

 

02 août 2020

Vient de paraître :

Empressé ou patient, fragile et lumineux comme un coquelicot, chaque poème avec audace se dédie aux grands jours.

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17 juin 2020

Carnet / À propos de Aux grands jours (à paraître)

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Empressé ou patient, fragile et lumineux comme un coquelicot, chaque poème avec audace se dédie aux grands jours

(Poème de 4ème de couverture) 

Photo © Marie-Christine Caredda


Aux grands jours regroupe cinq recueils parus entre 1992 et 2004 en éditions limitées. Quatre sont des plaquettes : Le passant du grand large (1995), L'alerte joyeuse (1997), La jeune fille (édition bilingue français / portugais, 2001) et Le monde lisible (2004). Le plus ancien des cinq recueils, Le pétrin de la foudre, date de 1992 et provient d'un livre collectif illustré par le peintre Gabriel Guy.

J'ai hésité à réunir ces ouvrages en un volume aussi longtemps après leur première publication. Le principal problème d'une telle entreprise est de savoir s'il faut corriger voire réécrire ou tout laisser en l'état d'origine. J'ai choisi la première option, notamment pour l'ensemble intitulé Le pétrin de la foudre écrit dans une période de ma vie marquée par une exaltation parfois préjudiciable à la précision de la forme. Je ne pense pas que les modifications apportées nuiront à l'expression de l'élan vital qui s'exprime dans ce cycle. On trouvera en conclusion de ce volume l'extrait d'un entretien avec mon ami Jean-Jacques Nuel, éditeur de deux de mes livres.

 

Le pétrin de la foudre parut quelques semaines avant une rupture dans ma vie professionnelle. Il fallait à cet ensemble un titre en mesure d'exprimer les forces contradictoires qui me tenaillaient à cette époque où l'inquiétude du lendemain et l'élan de renaissance me consumaient. C'est en visitant une exposition consacrée à l'environnement naturel de ma région que ce titre me fut révélé, je n'ose dire par hasard. Arrivé à la section spéléologie, mon attention fut attirée par une grande carte du relief jurassien affichée sur un panneau. Au milieu des noms de massifs forestiers, de monts et de rivières, la mention Pétrin de la foudre me sauta aux yeux. Il s'agit d'un gouffre situé à proximité de la commune de Choux très proche de mon village dans ces montagnes parfois frappées par de violents orages où j'ai pour le meilleur et pour le pire mes racines.

 

Le congé du buveur est une suite de miniatures qui portait dans l'édition de 1992 le sous-titre d'interludes narratifs. J'ai renoncé à cette mention que je juge aujourd'hui trop pompeuse pour qualifier ces instantanés comportant parfois quelques références surréalistes parodiques et quelques traits d'humour. Dans le titre, le mot congé est à lire non seulement dans sa signification habituelle de vacances mais encore dans le sens qu'il revêt dans la législation du commerce et de la circulation de l'alcool soumise à des droits de douane. Cela nous amène au personnage du buveur livré aux humeurs changeantes de sa fatigue et de son demi-songe.

 

Le Passant du grand large est le recueil que j'ai le plus modifié pour la présente édition parce que les différents thèmes abordés s'y côtoient dans un désordre que je juge aujourd'hui excessif. J'ai donc élagué et raboté cet ensemble qui méritait plus de cohérence.

 

J'ai écrit L'alerte joyeuse dans le sillage du Passant du grand large, c'est-à-dire dans un état d'esprit assez proche mais moins aventureux.

Il s'agissait de retrouver un équilibre, de renouer avec des sensations simples, de tenter d'habiter poétiquement le monde (Hölderlin).

 

La jeune fille. L'opportunité d'une traduction en portugais, à mon goût la langue idéale de la poésie, me conduisit à écrire cette évocation du personnage quasi mythologique de la jeune fille. On trouvera en annexe de ce volume le texte traduit.

 

Le monde lisible. Malgré son titre pouvant évoquer une certaine sérénité, Le monde lisible marque une rupture avec l'univers poétique de mes débuts. Cet ensemble annonce le ton et les choix narratifs adoptés par la suite dans mes Poèmes du bois de chauffage publiés quatorze ans plus tard en 2018.

 

Poèmes rescapés. Il s'agit de quelques textes issus de différents recueils et revues introuvables, des écrits de mes débuts. Des rescapés, évidemment, parce que je n'ai pas éprouvé le besoin de les retoucher.

 

La jeune fille aux sandales de sable et L'île des libellules transparentes. La publication de textes revus et corrigés laisse à l'auteur une légère frustration. J'ai donc décidé d'intégrer en conclusion de ce volume deux inédits déjà anciens qui partagent une particularité. Ils n'ont jamais voulu se stabiliser en prose ou en vers. Le problème n'est pas rare mais il trouve d'habitude une solution en quelques mois. Il n'en va pas de même pour La jeune fille aux sandales de sable et pour L'île des libellules transparentes qui refusent tous deux depuis des années de se couler dans le moule du poème ou de la nouvelle. Je pense donc qu'ils ont leur place dans cet ensemble dominé par le thème récurrent de l'été, notamment avec la figure poétique de la jeune fille qui symbolise à mes yeux beaucoup plus cette saison que le printemps, tout comme le voyageur stupéfait de découvrir que son île, rêvée dans une chambre d'hôtel, existe.

 

© Club, 2020.

© Blog littéraire de Christian Cottet-Emard, ISSN 2266-3959.